Dans son étude EC 2018-07, la Commission commune de doctrine comptable de la CNCC et du CSOEC considère que le taux de rotation du personnel à retenir pour l’évaluation des indemnités de fin de carrière (IFC) doit être déterminé en en tenant compte que des prévisions de démission, à l’exclusion de toute autre hypothèse de départ.
Les deux questions suivantes ont été posées dans l’étude comptable de la Commission commune de doctrine comptable de la CNCC et du CSOEC (EC 2018-07) portant sur la détermination du taux de rotation du personnel pour les besoins de l’évaluation des engagements de retraite et avantages similaires.
Questions :
- Le taux de rotation du personnel utilisé pour évaluer les engagements au titre des indemnités de fin de carrière en application de la recommandation ANC n° 2013-02 doit-il se limiter aux prévisions de démission et ne pas inclure d’autres causes de départ telles que les licenciements et les ruptures conventionnelles ?
- Quelles sont les modalités de calcul du taux de rotation du personnel pour l’évaluation des engagements au titre des indemnités de fin de carrière dans les comptes consolidés établis selon les IFRS ?
CONTEXTE FRANÇAIS
D’une part, le seul engagement de retraite supporté par l’entreprise est constitué par les indemnités de fin de carrière du personnel.
La législation française prévoit le versement de ces indemnités aux salariés au moment de leur départ en retraite, en fonction de leur ancienneté et de leur salaire à l’âge de la retraite.
D’autre part, la loi prévoit le versement d’une indemnité légale ou conventionnelle minimum en cas de licenciement ou rupture conventionnelle, qui est en général d’un montant proche, voire supérieur, à celui de l’indemnité de départ à la retraite qui aurait été obtenue si l’employé était resté au service de l’entreprise jusqu’à ce qu’il puisse en bénéficier.
RAPPEL DU RÉFÉRENTIEL COMPTABLE FRANÇAIS
Le droit comptable français n’impose pas la comptabilisation au passif des engagements de retraite et assimilés et offre la possibilité de mentionner ces engagements dans l’annexe. Il ne contient aucune disposition prescriptive sur la manière d’évaluer les engagements, que l’entité ait choisi de les provisionner ou de les mentionner en annexe.
Dans ce contexte, l’ANC a publié la recommandation N° 2013-02 qui fournit des dispositions sur le mode d’évaluation des engagements.
Les indemnités de fin de carrière sont considérées comme des avantages à prestations définies, ressortant de la catégorie des avantages postérieurs à l’emploi dont la prise en charge s’effectue de façon linéaire pendant toute la durée d’acquisition conditionnelle des droits conférés aux bénéficiaires, tout en probabilisant les risques que le salarié quitte l’entreprise avant son départ en retraite.
L’ANC recommande aux entreprises d’appliquer l’une des deux méthodes suivantes :
- Méthode 1 : Application des dispositions présentées dans l’annexe 1 de la recommandation, relative aux règles d’évaluation et de comptabilisation des engagements de retraite et avantages similaires ;
- Méthode 2 : Application des dispositions de la norme IAS 19, à l’exception de celles traitant de l’information en annexe au titre des engagements de retraite et avantages similaires à prestations définies.
La comptabilisation des régimes à prestations définies implique pour l’entreprise d’utiliser des techniques actuarielles pour estimer de façon fiable le montant des avantages accumulés par les membres du personnel en contrepartie des services rendus pendant l’exercice et les exercices antérieurs. Ces techniques actuarielles comprennent (1) des hypothèses démographiques (mortalité et rotation du personnel) et (2) des hypothèses financières (taux d’actualisation, augmentations futures des salaires et des coûts médicaux…).
Par exception, les entreprises ou les groupes de moins de 250 salariés peuvent définir leurs propres modalités d’évaluation des engagements de retraite et avantages similaires (modalités simplifiées). L’ANC précise que ces entreprises peuvent, à tout moment, décider d’adopter la méthode 1 ou la méthode 2 tout en respectant les règles relatives à la permanence des méthodes.
La question soulevée se situe uniquement dans le cadre de l’application de la recommandation ANC N° 2013-02 et provient de ce que celle-ci n’indique pas comment déterminer le taux de rotation du personnel pour les besoins de l’évaluation de l’engagement ou de la provision.
RÉPONSE DE LA COMMISSION COMMUNE DE DOCTRINE COMPTABLE
- Détermination du taux de rotation du personnel selon le référentiel comptable français :
Une entité est tenue de verser des indemnités de fin de carrière à ses salariés, sous condition que ceux-ci soient encore en activité au sein de l’entité au moment où ils liquident leur droit à retraite. Si l’entité choisit de licencier un salarié avant son départ à la retraite, ou si elle convient avec lui d’une rupture anticipée de son contrat de travail, elle sera tenue de lui verser une indemnité. Dans les deux cas, le montant est généralement calculé sur les mêmes bases (en pourcentage de mois de salaire par année d’ancienneté).
L’entité est donc tenue de payer une indemnité au salarié qui la quitte. Le seul cas de départ du salarié n’engendrant le paiement d’aucune indemnité est celui de la démission.
Dans ce contexte, la Commission considère que le taux de rotation du personnel à prendre en considération dans les hypothèses démographiques utilisées pour l’évaluation des indemnités de fin de carrière doit être déterminé en ne tenant compte que des prévisions de démission, à l’exclusion de toute autre hypothèse de départ.
- Détermination du taux de rotation du personnel selon les IFRS
Le raisonnement développé selon les normes IFRS pour répondre à la question soulevée est sensiblement identique à celui décrit ci-dessus selon les règles comptables françaises.
Les licenciements étant sous le contrôle de l’entreprise, ils ne peuvent être provisionnés qu’à la date d’annonce des licenciements conformément aux conditions imposées par IAS 19 (paragraphes 165-167).
En conséquence, tenir compte des futurs licenciements dans le calcul du taux de rotation retenu pour l’évaluation de l’engagement de retraite aboutirait à sous-évaluer les provisions reconnues au bilan au titre des indemnités de départ à la retraite.
Au regard d’IAS 19, quelle que soit la cause de départ du salarié, hormis le cas d’une démission, qu’il s’agisse d’un départ en retraite ou d’un licenciement, la société est tenue de verser une indemnité minimum, de manière certaine. Seule la date du versement est incertaine.
La norme IAS 19 (paragraphe 164) impose de provisionner les indemnités dont le paiement est certain en tant qu’avantage postérieur à l’emploi et non en tant qu’indemnité de rupture du contrat de travail.
@ATH2019