La loi « relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels » (Loi n°2016-1088 du 8 août 2016) a été publiée au Journal Officiel le 9 août 2016. Elle apporte des changements dans plusieurs domaines mais de nombreuses dispositions n’entreront en vigueur que lorsque les décrets d’application auront été publiés. Nous vous proposons un panorama des principales mesures relatives à la durée du travail et aux congés.
Objectifs
La loi « Travail » a pour objectif la refondation de notre modèle social pour permettre aux acteurs économiques de s’adapter aux changements du monde du travail.
D’ici à 2 ans, une commission d’experts et de praticiens assistés par les partenaires sociaux, proposera une réécriture du Code du travail avec, pour objectif, de laisser une place centrale à la négociation collective, notamment au niveau de l’entreprise. Le Code du travail sera ainsi réorganisé sur 3 niveaux :
- les règles impératives auxquelles il ne peut pas être dérogé,
- celles pouvant faire l’objet d’une négociation collective,
- celles qui s’appliquent en l’absence d’accord collectif.
L’article 8 de la loi adopte d’ores et déjà cette future architecture en matière de durée du travail, de jours fériés, de congés payés et de congés spécifiques.
Durée du travail
La nouveauté réside dans le fait que pour la quasi-totalité des dispositions relatives à la durée du travail il est possible de déroger à la loi par accord collectif, sauf s’il s’agit de dispositions d’ordre public. Dorénavant, en matière de durée du travail, dans la plupart des dispositions, l’accord d’entreprise prime sur l’accord de branche même s’il est moins favorable que l’accord de branche. Précédemment, l’accord de branche primait presque toujours sur l’accord d’entreprise. On peut noter que, dans la majorité des cas, les règles relatives à la durée du travail ne sont pas modifiées mais elles font l’objet d’une réécriture afin d’être organisées selon la nouvelle architecture du Code du travail. Ces dispositions s’appliquent aux accords conclus à compter du 10 août 2016.
Ainsi, par exemple, le taux de majoration des heures supplémentaires est désormais fixé par accord d’entreprise ou à défaut par accord de branche avec un plancher de 10 %. En l’absence d’accord d’entreprise ou de branche, le taux de majoration légal s’applique (25 % pour les 8 premières heures supplémentaires). L’accord d’entreprise peut également définir la période hebdomadaire de décompte des heures supplémentaires : 7 jours consécutifs au choix, à défaut la semaine est définie du lundi au dimanche.
Nouveauté en matière d’aménagement du temps de travail, dans les entreprises de moins de 50 salariés, à défaut d’accord collectif, l’employeur pourra unilatéralement organiser le temps de travail sur une période d’au plus 9 semaines (décret à paraître).
Conventions de forfait jours
La loi « Travail » enrichit le contenu obligatoire des conventions de forfait en jours afin de créer, conformément aux prescriptions de la jurisprudence, une obligation pour l’employeur de s’assurer régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable.
Ainsi, les accords conclus à compter du 10 août 2016 doivent notamment prévoir :
- les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi de la charge de travail,
- les modalités selon lesquelles l’employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l’articulation entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération et sur l’organisation du travail,
- les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.
Les employeurs ayant conclu des conventions de forfait sur la base d’accords collectifs ne contenant pas l’ensemble des nouvelles clauses pourront sécuriser les conventions de forfait existantes en mettant en place des mesures supplétives fixées par le Code du travail (établissement d’un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées, charge de travail du salarié compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires, entretien annuel avec le salarié pour évoquer sa charge de travail,…).
L’employeur peut également décider de mettre les accords existants en conformité avec les nouvelles mentions obligatoires ; dans ce cas, l’exécution de ces conventions se poursuivra sans que l’employeur ait besoin d’obtenir l’accord du salarié.
Congés payés
La loi « Travail » apporte plusieurs nouveautés en matière de congés qui sont entrées en vigueur le 10 août 2016 :
- ouverture au père des congés supplémentaires « jeune mère de famille »,
- possibilité de prendre les congés dès l’embauche et non plus à compter de l’ouverture des droits,
- versement de l’indemnité de congés payés en cas de licenciement pour faute lourde.
Parallèlement à ces règles qui s’imposent à l’employeur, d’autres peuvent être fixées par un accord d’entreprise ou un accord de branche. Sur ces sujets, l’accord conclu au niveau de l’entreprise prime sur l’accord de branche et ce, même s’il est moins favorable au salarié.
On peut citer, entre autres, la majoration de la durée des congés en raison de l’âge, de l’ancienneté ou du handicap, la période de prise des congés (qui comprend obligatoirement la période allant du 1er mai au 31 octobre), l’ordre des départs en congés …
Un accord d’entreprise ou à défaut un accord de branche peut également fixer la période de référence pour l’acquisition des congés payés (année civile par exemple) (sauf entreprise relevant d’une caisse de congés payés). A défaut d’accord, la période de référence sera fixée par décret (actuellement, la période de référence court du 1er juin au 31 mai de l’année suivante).
Congés pour événements familiaux
La loi augmente la durée de certains congés pour événements familiaux :
- 5 jours pour le décès d’un enfant (2 jours antérieurement),
- 3 jours pour le décès du père, mère, beau-père, belle-mère, frère, sœur (1 jour antérieurement),
- 3 jours pour le décès du conjoint, du partenaire lié par un PACS ou du concubin (précédemment, il y avait 2 jours pour le conjoint et le Pacsé et aucun jour pour le concubin),
- 2 jours en cas « d’annonce de la survenue d’un handicap chez l’enfant » (nouveau congé).
La durée des congés pour événements familiaux fixée par la loi est une durée minimale, un accord d’entreprise ou à défaut de branche, pouvant fixer une durée supérieure.
Jours fériés
Les principales règles qui s’appliquent aux jours fériés ont été reprises sans changement par la loi « Travail » et constituent des dispositions d’ordre public auxquelles l’employeur ne peut déroger. Sont concernés la définition des jours fériés nationaux ainsi que le maintien du salaire et la non récupération des heures de travail perdues lorsque ces jours sont chômés dans l’entreprise.
Nouveauté : le maintien de la rémunération pendant les jours chômés pour les salariés ayant au moins 3 mois d’ancienneté est étendu aux travailleurs saisonniers qui, en raison de plusieurs contrats de travail, successifs ou non, cumulent une ancienneté d’au moins 3 mois dans l’entreprise.
Comme auparavant, les jours fériés chômés dans l’entreprise sont fixés par un accord collectif. Mais désormais, l’accord conclu au niveau de l’entreprise prévaut sur l’accord de branche et ce, même s’il est moins favorable aux salariés, l’accord de branche s’applique uniquement si rien n’est prévu par un accord d’entreprise. A défaut d’accord collectif, il appartient à l’employeur de déterminer lui-même les jours fériés chômés dans l’entreprise. Le 1er mai reste un jour férié, chômé.
©ATH2016