La loi « relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels » (Loi n°2016-1088 du 8 août 2016) a été publiée au Journal Officiel le 9 août 2016. Elle apporte des changements dans le domaine de la durée du travail et des congés mais aussi dans plusieurs autres domaines. Toutefois, de nombreuses dispositions n’entreront en vigueur que lorsque les décrets d’application auront été publiés.
Objectifs
La loi « Travail » a pour objectif la refondation de notre modèle social pour permettre aux acteurs économiques de s’adapter aux changements du monde du travail.
D’ici à 2 ans, une commission d’experts et de praticiens assistés par les partenaires sociaux, proposera une réécriture du Code du travail avec, pour objectif, de laisser une place centrale à la négociation collective, notamment au niveau de l’entreprise.
Le Code du travail sera ainsi réorganisé sur 3 niveaux :
- les règles impératives auxquelles il ne peut pas être dérogé,
- celles pouvant faire l’objet d’une négociation collective,20
- celles qui s’appliquent en l’absence d’accord collectif.
La loi adopte d’ores et déjà cette future architecture en matière de durée du travail, de jours fériés, de congés payés et de congés spécifiques. (Se reporter à la fiche Le point sur… La loi « Travail » – Durée du travail et congés).
Négociation collective
La négociation collective est au cœur de la loi « Travail ».
Dans les entreprises ayant au moins 50 salariés, la négociation collective a obligatoirement lieu avec les délégués syndicaux, s’il en existe dans l’entreprise. La loi « Travail » modifie les conditions de validité des accords collectifs d’entreprise en précisant désormais que, pour être valables, ils doivent être signés par des délégués syndicaux (DS) ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés (au lieu de 30 %). Toutefois, à défaut de remplir cette nouvelle condition, les DS ayant obtenu 30 % des suffrages exprimés peuvent signer un accord collectif, sous réserve que ce dernier soit approuvé par la majorité des salariés. Les dates d’entrée en vigueur de ces nouvelles modalités de négociation varient en fonction de l’objet de l’accord.
Les entreprises ne disposant pas de délégué syndical peuvent négocier, selon les cas, soit :
- avec un représentant élu du personnel mandaté par une organisation syndicale et dans ce cas, la négociation
peut porter sur tout sujet, l’accord devant être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, - avec un représentant élu du personnel non mandaté et dans ce cas, les sujets de négociation sont limités, l’accord devant être transmis à la commission paritaire de branche pour information (nouvelle simplification),
- avec un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative et la négociation peut, dans ce cas aussi, porter sur tout sujet (nouveauté), l’accord devant être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
A noter que la loi « Travail » invite les branches à conclure des accords types, ou clefs en main, que les entreprises de moins de 50 salariés pourront appliquer directement sans avoir à se doter de leur propre accord collectif. Le principe est d’offrir des options à l’employeur qui fait ses choix, en informe les délégués du personnel, s’il en existe, et les salariés puis officialise sa décision dans un document unilatéral. Il est possible de conclure des accords types sur tous les thèmes ouverts à la négociation.
Règlement intérieur
La loi « Travail » impose désormais aux employeurs de faire figurer dans le règlement intérieur les dispositions du Code du travail relatives aux agissements sexistes. Cette mesure, applicable depuis le 10 août 2016, nécessite de mettre à jour l’ensemble des règlements intérieurs.
Il est par ailleurs, possible d’intégrer au règlement intérieur des dispositions relatives au principe de neutralité et restreignant la manifestation des convictions des salariés. Toutefois, pour être valables, ces restrictions sont subordonnées à 2 conditions : elles doivent être justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et être proportionnées au but recherché.
Pour rappel, le règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises d’au moins 20 salariés. Toute infraction liée à la mise en place ou au contenu du règlement intérieur est sanctionnée pénalement.
Licenciement économique
La loi « Travail » modifie, à compter du 1er décembre 2016, la définition légale du licenciement pour motif économique. Aux difficultés économiques et aux mutations technologiques, s’ajouteront 2 motifs économiques de licenciement issus de la jurisprudence, à savoir : la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité et sa cessation d’activité.
Par ailleurs, la loi « Travail » fixe des indicateurs permettant d’apprécier la réalité des difficultés économiques. Ainsi, elles devront être «caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ».
La baisse des commandes ou du chiffre d’affaires deviendra significative lorsque sa durée, en comparaison avec la même période de l’année précédente, sera au moins égale à 1 trimestre pour les entreprises de moins de 11 salariés, 2 trimestres consécutifs pour celles entre 11 et moins de 50 salariés, 3 trimestres consécutifs pour celles de 50 à moins de 300 salariés et 4 trimestres consécutifs pour celles de 300 salariés et plus.
Médecine du travail
La loi « Travail » consacre le principe selon lequel tous les salariés bénéficient d’un suivi individuel de leur état de santé par le médecin du travail mais oriente prioritaire- ment l’action de ce dernier vers les salariés exposés aux risques les plus importants.
Ainsi, la visite médicale d’embauche, visant à apprécier l’aptitude au travail, ne sera plus systématique pour tous les travailleurs. Elle sera, en effet, réservée au salarié « affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou pour celles de ses collè- gues ou des tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail ». Les autres salariés se rendront à une simple visite « d’information et de prévention » réalisée après l’embauche.
De même, la visite médicale obligatoire tous les 2 ans disparaîtra et la périodicité du suivi par le médecin du travail dépendra, entre autres, des conditions du travail, de l’état de santé et de l’âge du salarié.
Ces mesures entreront en vigueur au plus tard le 1er janvier 2017 après parution des décrets nécessaires.
Compte personnel d’activité
À partir du 1er janvier 2017, tous les salariés et les demandeurs d’emploi disposeront d’un Compte personnel d’activité (CPA) regroupant notamment le Compte personnel de formation et le Compte pénibilité.
Le CPA intégrera également le nouveau « Compte d’engagement citoyen » qui recensera les activités de bénévolat ou de volontariat de son titulaire et lui permettra, en contrepartie, d’acquérir, au maximum, 60 heures sur son Compte personnel de formation.
Les modalités d’application de ce nouveau dispositif doivent encore être fixées par décret.
Bulletin de paie Dématérialisé
Actuellement, la remise au salarié d’une feuille de paie au format papier est la règle et sa version dématérialisée, l’exception.
Aussi, cette logique changera à partir du 1er janvier 2017, sous réserve de la parution des décrets d’application. Ainsi, l’employeur pourra transmettre au salarié un bulletin de paie dématérialisé sans avoir besoin de recueillir son accord. Par contre, si le salarié lui en fait la demande, l’employeur sera obligé de lui remettre une version papier.
Cette dématérialisation se fait dans des conditions à garantir l’intégralité, la disponibilité et la confidentialité des données.
Sur demande du salarié, le bulletin de paie sera hébergé via le « Compte personnel d’activité » par la Caisse des Dépôts et Consignations.
Droit à la Déconnexion
La loi « Travail » prévoit que, dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire, l’employeur doit, à partir du 1er janvier 2017, négocier sur le droit à déconnexion des salariés et la mise en place par l’entreprise de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques, en vue d’assurer le respect des temps de repos et de congés. A défaut d’accord, l’employeur élabore une charte. Cette charte définit les modalités de l’exercice du droit à la déconnexion et prévoit en outre la mise en œuvre, à destination des salariés et du personnel d’encadrement et de direction, d’actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques.
©ATH2016