Il y a quelques jours, le CGCI (Comité des Groupements de Cabinets Indépendants) réalisait une enquête auprès de ses membres sur les évolutions du marché de l’audit. Deux ans et demi après la publication et le traumatisme de la loi PACTE, il semble important de dresser un premier état des lieux des impacts pour les commissaires aux comptes. Nous publions ci-après les principaux résultats de cette étude permettant d’apprécier les premières tendances de cette évolution du paysage de l’audit.
La concentration du marché des mandats EIP :
Certitude, le marché de l’audit des entités EIP est toujours marqué par une extrême concentration. Seul un cabinet membre du CGCI et répondant à l’enquête 2021 déclare disposer de plus de 50 mandats d’entités EIP et ils ne sont que 4 % de cabinets à déclarer disposer de 10 à 50 mandats.
Nombre de mandats détenus par le cabinet :
PACTE, une loi à impacts progressifs & successifs…
L’effet des mesures de suppression du mandat de commissaire aux comptes auprès des petites et moyennes entreprises est tel l’arsenic, un poison à diffusion lente.
En effet, à la question :
Sur la dernière année, quel est le nombre de mandats perdus en raison de PACTE ?
Les cabinets répondants à l’enquête sont un peu plus de 73 % à déclarer une perte de mandats de 1 à 10 au cours de la dernière année, et un peu plus de 12 % de 11 à 50 mandats.
Au cumul depuis PACTE, quel est le nombre de mandats perdus ?
De l’avis de tous, les effets des mesures de la loi PACTE concernant les mandats de commissariat aux comptes se diffusent progressivement dans les portefeuilles « audit » des cabinets. Compte tenu de l’échelonnement dans le temps, l’impact initial, s’il a bien eu lieu, a néanmoins été pour le moment encore limité. Les entreprises et les cabinets juridiques n’ont pas tous pris conscience des possibilités offertes depuis 2020.
De plus, les cabinets d’audit ont pour certains mieux communiqués sur le rôle du commissaire aux comptes et son importance et ainsi pu limiter les risques de non-renouvellement.
Mais le suivi dans le temps et sur les 5 prochaines années de ces indicateurs permettra de mieux mesurer les effets définitifs de la loi, et ce d’autant plus qu’au risque de non-renouvellement, il convient d’ajouter l’absence de nomination initiale pour les sociétés qui sont nouvellement créées et en dessous des seuils.
Une baisse du chiffre d’affaires « audit-cac » inéluctable ?
Conséquence logique des pertes de mandats enregistrées et des turbulences sur le marché de l’audit, 64 % des cabinets interrogés constatent une baisse de leur chiffre d’affaires « audit-cac ».
Le CA audit-commissariat aux comptes de votre cabinet a-t-il diminué depuis 2019 ?
Ces pertes de chiffres d’affaires sont sensiblement différentes selon les structures d’exercice professionnelles et leur degré d’exposition initial. À la question, si vous enregistrez une perte de chiffre d’affaires, celle-ci est de combien ? Ils sont 47 % à la chiffrer supérieure à 10 %.
Un rebond à confirmer, un métier à revendiquer et à transformer !
Deux ans et demi après PACTE, la profession de commissaire aux comptes poursuit sa transformation.
Si majoritairement, les cabinets sont encore traumatisés par les mesures brutales de suppression de mandats : ils sont 72 % à considérer que le marché de l’audit n’est pas actuellement un marché en développement, mais ils sont aussi 85 % à affirmer que l’audit est un besoin pour la sécurité économique du pays et 83 % à estimer que c’est un besoin à développer pour une gouvernance plus fiable des entreprises.
Quelle vision avez-vous de l’audit pour les 5 ans à venir ?
Afin de transformer la profession de commissaire aux comptes et revendiquer l’utilité de l’audit des entités, les cabinets sont prêts à investir principalement dans la formation de leurs équipes et la technologie.
Quels investissements consentez-vous pour l’audit et le commissariat aux comptes ?
Une nouvelle offre de services en construction !
A l’image des travaux et communications initiés par la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes, de nouvelles offres de services sont en cours de constitution au sein de la profession. Analyse du contrôle interne (95 %) et cartographie des risques (90%) restent des axes d’intervention plébiscités par les professionnels mais les nouvelles missions autour de l’analyse des risques cyber (71 %), des collectivités territoriales (64 %), de la RSE (63 %) et des prévisions financières (55 %) sont estimées comme des domaines légitimes d’intervention des CAC.
Selon vous, sur quels domaines le commissaire aux comptes doit-il intervenir ?
Une confiance institutionnelle persistante, une confiance du régulateur à créer
Sur le plan institutionnel 69 % des répondants font confiance à la CNCC par rapport à leur avenir professionnel mais ils ne sont que 24 % à accorder cette confiance à l’organe de régulation de la profession : le Haut Conseil du Commissariat aux Comptes. Dialogue constant, pédagogie, renforcement de la compréhension mutuelle et échanges sur la vision de l’avenir de la profession seront nécessaires pour aborder la transformation du métier d’auditeur dans un monde « post-Pacte ».
A suivre…
Forts de dix groupements de cabinets, représentant plus de 1 500 experts-comptables et commissaires aux comptes, exerçant dans environ 400 entités, le CGCI totalise près de 2 milliards d’honoraires dans les métiers historiques, mais aussi dans les activités de conseil. Force inéluctable de la profession, nous avons choisi d’être discrets, mais efficaces. Source de réflexions pour les groupements, le CGCI collabore avec les instances et les parties prenantes de notre profession.
L’enquête que nous avons menée, outre les constats qui apparaissent, permet une prise de conscience de tous nos adhérents, et de leurs membres, qu’après le choc de PACTE, un changement de paradigme intervient. Nous passons d’une ère où le commissaire aux comptes était vécu comme une obligation, à un commissaire aux comptes qui devient une valeur d’utilité reconnue par le marché et ses acteurs. Le CGCI adhère aux efforts que met en œuvre la CNCC traduits par le Président Yannick Ollivier, à l’occasion des
dernières assises.
L’enquête met en exergue les domaines dans lesquels les cabinets membres des adhérents voient comme « légitimes » le commissaire aux comptes. Que ce soit, Cartographie des Risques, Audits particuliers ou Cybersécurité, nous serons présents. Un effort de formation et d’équipements est largement plébiscité, afin que les cabinets soient plus performants, plus en phase avec leur marché. L’avenir est à construire dans la confiance.
Un point demeurera à travailler pour le CGCI, c’est celui de la relation avec le H3C afin que le ressenti des professionnels puisse évoluer. Nous rencontrons prochainement la Présidente du H3C, Florence Peybernès, et lui feront part des résultats de notre enquête, comme nous l’avons fait auprès du Président Yannick Ollivier.
Le CGCI se veut une force tranquille, discrète, opiniâtre et travailleuse au service de ses adhérents et des membres des groupements. Nous poursuivons nos travaux aussi, sur la partie Expertise Comptable, et reviendrons rapidement vers la revue La Profession Comptable, sur un sujet, celui de la DSP2, qui, aujourd’hui, perturbe l’organisation de nos cabinets.
André-Paul Bahuon
Président du CGCI
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